La distinction entre les statuts de société et un pacte d’actionnaires repose principalement sur leur portée, leur contenu, et leur nature juridique.
Dans le cadre du droit des sociétés, les statuts et les pactes d’actionnaires sont deux instruments essentiels à la structure et au fonctionnement des sociétés. Bien que complémentaires, ils servent des objectifs différents et ont des implications légales distinctes.
Définition
Les statuts de société sont un document obligatoire qui régissent le fonctionnement interne d’une société. Ils sont publics et doivent être déposés au registre du commerce et des sociétés. Les statuts définissent les règles relatives à la gouvernance de l’entreprise, comme la répartition du capital social, les pouvoirs des dirigeants, les modalités de prises de décisions et la distribution des bénéfices. En résumé, ils établissent les règles fondamentales de l’organisation et du fonctionnement de la société.
Le pacte d’actionnaires, en revanche, est un contrat privé conclu entre plusieurs actionnaires de la société. Il n’est pas obligatoire et n’a pas à être publié ou rendu public. Ce pacte peut comporter des engagements divers entre les actionnaires, tels que des clauses de préemption, de rachat mutuel des actions, de non-concurrence, ou encore des arrangements spécifiques sur la gouvernance de la société. Le pacte d’actionnaires peut également inclure des dispositions pour le maintien de certaines majorités, la répartition des sièges au conseil d’administration, ou d’autres aspects stratégiques et opérationnels de la société qui ne sont pas forcément couverts par les statuts. Lire l’article sur les clauses générales d’un pacte d’actionnaires.
Impact juridique et opposabilité
Les statuts, une fois déposés au registre du commerce, sont opposables à tous, y compris aux actionnaires et aux tiers. En revanche, le pacte d’actionnaires reste interne aux signataires et ne lie que ces derniers. Par exemple, en cas de cession d’actions, les clauses statutaires relatives à la cession sont applicables à tous, alors que celles contenues dans un pacte ne concernent que les parties au pacte.
Modification et flexibilité
La modification des statuts nécessite une décision en assemblée générale extraordinaire, avec des quorums et majorités spécifiques (ex SA : Code de commerce, art. L. 225-96), reflétant leur caractère solennel et leur impact sur la structure de la société. À l’inverse, le pacte d’actionnaires offre plus de flexibilité, puisqu’il peut être modifié selon les termes convenus entre les parties, sans formalités particulières, tant que les modifications respectent le cadre légal et les droits des tiers.
Contenu des statuts et du pacte d’actionnaires
Contenu des statuts
Les statuts d’une société contiennent des informations essentielles sur la structure et le fonctionnement de l’entreprise. L’article 1832 du code civil ainsi que certaines dispositions particulières prévoient les mentions obligatoires des statuts. Les éléments mentionnés dans les statuts sont :
- Dénomination sociale et forme juridique : Le nom de la société et sa forme (SA, SARL, etc.).
- Objet social : Les activités que la société est autorisée à exercer, ce qui détermine son champ d’action et limite ses opérations à ce qui y est décrit.
- Siège social : L’adresse légale de la société.
- Capital social : Le montant du capital de la société, la description des apports (numéraire, nature), la répartition des actions ou parts sociales entre les associés.
- Durée : La durée de vie de la société, souvent fixée par défaut à 99 ans.
- Administration et direction : Les règles de nomination, de révocation et les pouvoirs des dirigeants (président, directeur général, conseil d’administration).
- Fonctionnement des organes de gouvernance : Modalités de convocation, de réunion et de prise de décisions des assemblées générales et des conseils d’administration ou de surveillance.
- Répartition des bénéfices et règles de distribution des dividendes : Politique de répartition des profits, fréquence des distributions, et réserves obligatoires.
Ces éléments sont régis par le Code de commerce et doivent être respecter pour garantir la validité et l’efficacité des statuts.
Contenu du pacte d’actionnaires
Le pacte d’actionnaires traite des accords spécifiques entre les actionnaires et peut inclure des clauses non abordées dans les statuts, comme :
- Clauses de préemption : Droits donnés aux actionnaires d’acheter des actions avant qu’elles ne soient vendues à un tiers extérieur.
- Clauses de rachat : Conditions sous lesquelles les actionnaires peuvent être obligés ou avoir le droit de vendre ou racheter des actions.
- Clauses d’agrément : Conditions nécessitant l’approbation des autres actionnaires pour la cession d’actions à des tiers.
- Engagements de vote : Accords sur la manière dont les actionnaires voteront sur certaines questions importantes lors des assemblées générales.
- Clauses de non-concurrence : Interdictions pour les actionnaires de s’engager dans des activités concurrentes avec la société.
- Clauses de sortie conjointe (tag-along et drag-along) : Mécanismes protégeant les minoritaires (tag-along) ou permettant aux majoritaires de forcer les minoritaires à vendre leurs parts (drag-along) lors d’une cession contrôlée de la société.
- Mécanismes de résolution des conflits : Procédures pour la médiation ou l’arbitrage en cas de désaccord entre actionnaires.
Complémentarité et interactions
Les statuts et le pacte d’actionnaires sont complémentaires. Les statuts établissent le cadre légal et formel de la société, tandis que le pacte permet aux actionnaires de négocier des droits et des obligations supplémentaires de manière plus flexible et confidentielle. Cependant, il est important que le pacte d’actionnaires ne contrevienne pas aux dispositions statutaires et légales en vigueur pour éviter des conflits légaux et des nullités de clauses.
Conséquences des clauses incompatibles entre les statuts et le pacte d’actionnaires
Lorsque les dispositions d’un pacte d’actionnaires sont incompatibles avec celles des statuts de la société, diverses conséquences juridiques peuvent survenir, notamment la primauté des statuts, l’inopposabilité des clauses du pacte, et parfois des sanctions variées allant jusqu’à la nullité des actions prises en contravention des statuts.
Primauté des statuts
Les statuts d’une société ont une force obligatoire pour tous les actionnaires et sont opposables aux tiers, ce qui n’est pas systématiquement le cas des pactes d’actionnaires. En cas de contradiction entre les statuts et un pacte d’actionnaires, les stipulations des statuts prévalent généralement. La Cour de cassation a confirmé que les dispositions statutaires doivent prévaloir sur celles des pactes d’actionnaires lorsqu’il existe un conflit entre les deux.
Inopposabilité des clauses du Pacte
Les clauses du pacte d’actionnaires ne lient que les signataires et sont inopposables à la société et aux tiers, sauf si la société est elle-même signataire. Cela signifie que, dans un litige impliquant un tiers ou un actionnaire non-signataire du pacte, les dispositions du pacte ne peuvent être invoquées pour influencer la décision.
Nullité des décisions en contravention des Statuts
Les décisions prises en violation des statuts, par exemple lorsqu’un pacte d’actionnaires établit des règles différentes pour les décisions administratives ou la gestion, peuvent être annulées si elles contreviennent aux dispositions statutaires impératives. Ceci est particulièrement pertinent dans les structures comme la SAS, où les statuts définissent souvent les modalités précises de gouvernance.
Sanctions en cas de non-respect du pacte
La violation des clauses d’un pacte d’actionnaires peut entraîner des sanctions moins rigoureuses que celles appliquées pour la violation des statuts. Par exemple, alors que la violation d’une clause statutaire peut conduire à la nullité d’une opération, la violation d’une clause du pacte entraîne généralement seulement des dommages et intérêts.
Validité des clauses convenues par le pacte d’actionnaires
Les tribunaux ont également jugé que les conventions entre associés sont valables tant qu’elles ne contreviennent pas à une règle d’ordre public, à une stipulation impérative des statuts, ou à l’intérêt social. Cela souligne l’importance pour les actionnaires de s’assurer que leur pacte ne contient aucune clause qui irait à l’encontre des statuts de manière impérative.
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