Cession de créance : définition et enjeux juridiques

par | 4 Oct, 2024 | Exprime Avocat, Recouvrement de créances

La cession de créance est un mécanisme juridique qui permet à un créancier (le cédant) de transférer une créance à un tiers (le cessionnaire), qui devient alors le nouveau créancier vis-à-vis du débiteur (appelé le débiteur cédé). Régie par les articles 1321 à 1326 du Code civil, cette opération permet d’assurer la transmission des droits de créance sans nécessairement obtenir l’accord préalable du débiteur, bien que certaines formalités doivent être respectées.

Les conditions de la cession de créance

Pour qu’une cession de créance soit valable, plusieurs conditions doivent être réunies :

  • Existence d’une créance : Seules les créances existantes ou futures (mais déterminables) peuvent être cédées. La créance doit être certaine, liquide et exigible, même si elle n’est pas encore arrivée à échéance. Par exemple, une entreprise peut céder à un tiers le montant des factures émises envers ses clients avant que ceux-ci ne les aient payées.
  • Consentement du créancier (cédant) : C’est le créancier d’origine qui prend l’initiative de céder sa créance à un tiers. Cette cession peut intervenir pour plusieurs raisons, comme le besoin de liquidités ou dans le cadre d’une réorganisation financière.
  • Notification au débiteur cédé : Même si le débiteur n’a pas à donner son accord, il doit être informé de la cession pour pouvoir payer valablement le nouveau créancier. Si le débiteur n’est pas informé de la cession, il peut continuer à payer son ancien créancier en toute bonne foi, ce qui libère sa dette.

Les différentes formes de cession de créance

Il existe plusieurs types de cessions de créance en fonction des objectifs poursuivis par le cédant et le cessionnaire :

  • La cession à titre onéreux : Le créancier cède sa créance en échange d’un prix, souvent inférieur au montant nominal de la créance. Cela permet au créancier de récupérer des liquidités immédiates sans attendre l’échéance de la créance. Ce type de cession est fréquent dans le cadre du recouvrement de créances par des sociétés spécialisées qui rachètent les créances en souffrance et se chargent ensuite de leur recouvrement.
  • La cession à titre gratuit : Une créance peut également être cédée gratuitement. Cela se produit généralement dans le cadre familial ou amical, ou lorsque le créancier souhaite aider une personne en lui transférant une créance sans contrepartie financière.
  • La cession de créance en garantie : Ce mécanisme est souvent utilisé dans les opérations bancaires et financières. Un créancier peut céder une créance à titre de garantie d’un prêt. Si le prêt n’est pas remboursé, le cessionnaire (souvent une banque) pourra se rembourser avec les montants perçus de la créance cédée.

Les effets de la cession de créance

La cession de créance emporte plusieurs effets, tant pour les parties à l’acte que pour le débiteur cédé.

  • Pour le cédant (ancien créancier) : Dès que la cession est conclue, le cédant n’a plus aucun droit sur la créance. Il ne peut plus exiger de paiement du débiteur, sauf si la cession a été conclue sous condition résolutoire, comme dans certains cas où la cession n’est effective que si le débiteur paie.
  • Pour le cessionnaire (nouveau créancier) : Le cessionnaire devient titulaire de la créance dès la conclusion de l’acte de cession. Il acquiert tous les droits qui y sont attachés, y compris les garanties et sûretés éventuelles (hypothèque, caution, etc.). Le cessionnaire pourra donc exiger le paiement de la créance, sous les mêmes conditions que le cédant.
  • Pour le débiteur cédé : Le débiteur doit payer le cessionnaire dès lors qu’il a été informé de la cession. Si la cession lui est notifiée après qu’il ait effectué un paiement au cédant, il est dégagé de toute obligation envers le cessionnaire. Le débiteur peut également opposer au cessionnaire les mêmes exceptions qu’il aurait pu invoquer contre le cédant (par exemple, la nullité du contrat ou la compensation avec une autre créance).

La notification et l’opposabilité de la cession au débiteur

Le point essentiel de la cession de créance est sa notification au débiteur. En effet, si le débiteur n’est pas informé, il pourra continuer de payer le cédant, ce qui le libérera de son obligation vis-à-vis du cessionnaire. La notification peut se faire par voie d’huissier ou par lettre recommandée avec accusé de réception, ce qui permet de dater formellement la connaissance par le débiteur de la cession.

Si la cession n’est pas notifiée au débiteur, celle-ci n’est pas opposable à ce dernier. Cela signifie que le débiteur n’a aucune obligation de reconnaître le cessionnaire comme nouveau créancier, à moins qu’il n’ait pris connaissance de la cession d’une autre manière.

Les exceptions à la cession de créance

Certaines créances ne peuvent pas être cédées, soit en raison de leur nature, soit en vertu d’une interdiction légale ou contractuelle. Par exemple :

  • Les créances purement personnelles : Les créances liées à des obligations strictement personnelles, comme une pension alimentaire, ne peuvent pas être cédées, car elles reposent sur une relation spécifique entre le créancier et le débiteur.
  • Interdictions contractuelles : Certains contrats stipulent expressément que la créance qui en découle ne peut être cédée à un tiers. Cette interdiction peut être mise en place pour des raisons économiques ou de confidentialité.

Les avantages et les inconvénients de la cession de créance

La cession de créance présente des avantages pour les parties impliquées :

  • Pour le cédant : La cession permet souvent au créancier de récupérer rapidement des liquidités, même s’il doit accepter un montant inférieur à la valeur nominale de la créance. Cela peut être particulièrement utile en cas de difficultés de trésorerie ou pour alléger la gestion des créances.
  • Pour le cessionnaire : L’achat de créances peut constituer une opportunité d’investissement, en particulier si le cessionnaire a des compétences ou des moyens pour recouvrer les créances de manière efficace.

Cependant, la cession de créance présente aussi des inconvénients :

  • Pour le cédant : Le cédant peut se voir imposer une décote importante sur la créance, surtout si celle-ci est jugée difficile à recouvrer.
  • Pour le cessionnaire : Le cessionnaire prend un risque, car rien ne garantit que le débiteur paiera la créance. Il devra parfois engager des procédures de recouvrement coûteuses et chronophages.

Conclusion

La cession de créance est un outil juridique flexible qui permet à un créancier de transférer ses droits à un tiers. Ce mécanisme est largement utilisé dans les affaires, notamment pour améliorer la gestion de trésorerie ou pour externaliser le recouvrement de créances. Cependant, il nécessite de respecter un certain formalisme, notamment en ce qui concerne la notification au débiteur, et peut comporter des risques pour le cessionnaire. Avant de procéder à une cession de créance, il est conseillé de bien évaluer les enjeux économiques et juridiques liés à cette opération.

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