Déshérence : définition et enjeux juridiques

par | 21 Fév, 2025 | Articles droit de la famille, Articles droit des sociétés, Exprime Avocat

Déshérance

La notion de déshérence en droit désigne la situation dans laquelle un bien ou une succession n’a plus de titulaire identifiable, soit par absence d’héritiers légaux ou testamentaires, soit par renonciation de ces derniers. En droit, la déshérence se rencontre principalement en droit des successions, où l’absence d’héritiers conduit à l’attribution des biens du défunt à l’État. Toutefois, elle peut également concerner des biens abandonnés, notamment en droit immobilier et en droit des sociétés.

Loin d’être une simple conséquence du décès sans héritiers, la déshérence soulève plusieurs questions fondamentales : Qui peut revendiquer un bien en déshérence ? Quels sont les droits et obligations de l’État dans ce cadre ? Quelles sont les procédures applicables à la déclaration de déshérence ?

Cet article présente la notion de déshérence, son cadre juridique et les contentieux qu’elle peut engendrer.

Définition

La déshérence est définie comme la situation où un bien, faute de propriétaire identifiable ou revendiqué, revient à l’État. Elle s’applique principalement dans deux cas :

  • Déshérence successorale : Lorsqu’une personne décède sans héritier ou avec des héritiers ayant renoncé à la succession, l’État recueille les biens du défunt en vertu de l’article 539 du Code civil.
  • Déshérence des biens sans maître : Un bien immobilier sans propriétaire connu ou abandonné par son propriétaire peut être acquis par la commune, en application de l’article 713 du Code civil.

La déshérence ne signifie pas l’absence totale de titulaire, mais plutôt l’existence d’un vide juridique temporaire qui conduit à l’intervention de l’État en tant que dernier bénéficiaire.

Principes généraux encadrant la déshérence

  • Principe de subsidiarité : L’État ne devient propriétaire des biens en déshérence qu’à titre subsidiaire, c’est-à-dire en l’absence de toute autre solution possible (héritiers, légataires, créanciers).
  • Principe de continuité des patrimoines : L’objectif de la loi est d’éviter que des biens restent sans propriétaire et deviennent inutilisables.
  • Principe de gestion temporaire : Avant de devenir pleinement propriétaire, l’État doit suivre une procédure d’attribution spécifique permettant d’éventuelles revendications.

Le régime juridique de la déshérence Successorale

    En l’absence d’héritiers identifiés ou lorsque tous les héritiers renoncent à la succession, les biens du défunt sont considérés comme étant en déshérence et reviennent à l’État.

    L’article 539 du Code civil prévoit que :

    « Les biens des personnes qui décèdent sans héritiers ou dont les successions sont abandonnées appartiennent à l’État. »

    La déshérence successorale suit un processus encadré :

    1. Ouverture de la succession par un notaire qui tente d’identifier les héritiers.
    2. Recherches généalogiques (le cas échéant) pour retrouver des ayants droit.
    3. Publication d’un appel aux héritiers potentiels.
    4. Renonciation ou absence d’héritiers dans le délai légal de prescription.
    5. Attribution des biens à l’État, gérés par la Direction nationale d’interventions domaniales (DNID) sous l’autorité de la Direction générale des Finances publiques (DGFIP).

    Effets juridiques

    • Droits de l’État : L’État devient propriétaire du patrimoine du défunt et peut disposer librement des biens (vente, conservation, destruction).
    • Sort des créanciers : L’État ne paie pas les dettes du défunt, sauf si les actifs successoraux suffisent à les couvrir.
    • Droit de réintégration des héritiers tardifs : Un héritier qui se manifeste après la déclaration de déshérence peut réclamer la restitution des biens dans un délai de 30 ans (article 2224 du Code civil).

    La Déshérence des biens sans Maître en droit immobilier

      Lorsqu’un bien immobilier n’a aucun propriétaire identifiable, il peut être déclaré en déshérence au profit de la commune ou de l’État.

      Deux situations sont prévues par l’article 713 du Code civil :

      Les biens sans maître : Ce sont des biens immobiliers dont le propriétaire est inconnu ou décédé sans héritier, et qui n’ont fait l’objet d’aucun acte de possession depuis 30 ans. Ils reviennent à l’État.

      Les biens abandonnés : Un bien dont le propriétaire n’a pas payé de taxes foncières depuis 3 ans peut être revendiqué par la commune concernée.

      Procédure de déclaration

      1. Constat d’absence de propriétaire par la commune.
      2. Publication d’un avis administratif pour rechercher d’éventuels titulaires.
      3. Déclaration en déshérence après expiration des délais légaux.
      4. Attribution du bien à la commune ou à l’État, avec possibilité de vente aux enchères ou de mise à disposition pour des projets d’intérêt général.

      Effets juridiques

      • Acquisition automatique du bien par l’État ou la commune.
      • Impossibilité pour un particulier de revendiquer un bien abandonné sans titre juridique valide.
      • Réaffectation possible du bien au domaine public ou à la vente privée.

      La déshérence en droit des sociétés et des biens mobiliers

      Déshérence des parts sociales et actions

      En cas de décès d’un associé sans héritier ou légataire, ses parts sociales ou actions peuvent tomber en déshérence et revenir à l’État. Cependant, la situation varie selon :

      • Les statuts de société : Certaines clauses permettent la réattribution des parts aux associés survivants.
      • Les dispositions du Code de commerce : L’État peut liquider les parts en déshérence au profit du Trésor public.

      Déshérence des comptes bancaires inactifs et biens mobiliers

      La loi prévoit des règles spécifiques pour les comptes bancaires et biens mobiliers non réclamés :

      Loi Eckert du 13 juin 2014 : Les fonds des comptes inactifs depuis 10 ans reviennent à la Caisse des Dépôts et Consignations.

      Objets en déshérence (ex. coffres-forts) : Après 30 ans, ils sont attribués à l’État.

      Contentieux liés à la déshérence

        Certains héritiers ou tiers peuvent contester une déclaration de déshérence.

        Revendication par les héritiers

        Un héritier peut revendiquer la succession en déshérence dans un délai de dix ans à compter de l’envoi en possession de l’État. Cette revendication est possible à condition que l’héritier n’ait pas renoncé à la succession ou que l’État n’ait pas encore été envoyé en possession de manière définitive.

        Responsabilité de l’État

        L’État peut voir sa responsabilité engagée s’il manque à ses obligations dans la gestion des biens successoraux. Par exemple, si l’État ne respecte pas les formalités légales ou s’il cause un préjudice aux héritiers qui se manifesteraient ultérieurement, il peut être condamné à des dommages et intérêts.

        Contestation de l’envoi en possession

        Les décisions d’envoi en possession peuvent faire l’objet de contestations, notamment si des héritiers ou des créanciers estiment que leurs droits ont été lésés. Ces contestations sont portées devant le tribunal judiciaire compétent.

        Cas particuliers : Successions sans maître

        Lorsque personne ne réclame une succession, pas même l’État, les biens successoraux peuvent être qualifiés de « biens sans maître ». Ces biens sont attribués à la commune du lieu de leur situation après un délai de 10 ou 30 ans, selon les cas. La commune peut toutefois renoncer à ces biens, auquel cas ils reviennent à l’État.

        Conclusion

        La déshérence est un mécanisme essentiel du droit permettant d’éviter qu’un patrimoine ne devienne sans titulaire. Toutefois, elle soulève des questions juridiques complexes, notamment en matière successorale et immobilière.

        Le contentieux lié à la déshérence soulève des diffiucltés, mêlant des questions de droit successoral, de gestion des biens publics et de responsabilité de l’État. La procédure d’envoi en possession, bien que rigoureusement encadrée, peut donner lieu à des litiges, notamment en cas de revendication tardive par des héritiers ou de mauvaise gestion des biens par l’administration. Ces situations nécessitent une vigilance particulière pour garantir le respect des droits de toutes les parties concernées.

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