Contrairement à d’autres formes de sociétés, aucun texte n’interdit à la société civile de garantir la dette d’un associé. Dès lors, la SCI peut se porter caution d’un prêt consenti au profit d’un associé de la société. Il faudra néanmoins respecter les limites de l’objet social et de l’intérêt social.
Les modalités de conformité de l’acte à l’objet social
Conformément à l’article 1849 c. civ, seules les actes rentrant dans l’objet social peuvent engager la société à l’égard des tiers. De manière générale, l’acte de cautionnement pour autrui ne rentre pas dans l’objet social d’une SCI. Pour rappel, l’acte conclu par le gérant d’une société civile dépassant l’objet social pourra être annulé.
La jurisprudence a néanmoins apporté quelques précisions sur la validité d’un acte de cautionnement d’une SCI au profit d’un associé. En effet, à défaut d’objet social permettant l’octroi de garantie (cautionnement), la jurisprudence a admis deux autres hypothèses. Tout d’abord, le cautionnement pourra être valable s’il a été donné avec le consentement de tous les associés (Cass. com., 12 oct. 2004, n°03-13.999). Celui-ci sera également valide s’il existe une communauté d’intérêts entre la société garante et la société débitrice principale (Cass. com., 26 juin 2007, n°06-10.766).
Dès lors, comme le précise la Cour de cassation, le cautionnement donné par une société civile n’est valable que s’il entre directement dans son objet social ou s’il existe une communauté d’intérêts entre cette société et la personne cautionnée ou s’il résulte du consentement unanime des associés (Cass. 1er civ., 8 nov. 2007, n°04-17.893).
Si le consentement unanime des associés ou l’existence d’une communauté d’intérêts permet de réaliser l’acte de garantie, à défaut d’objet social l’autorisant, cela reste néanmoins insuffisant. En effet, en plus de respecté l’objet social, l’acte ne doit pas être contraire à l’intérêt social. Il s’agit donc de déterminer qu’elles sont les actes contraires à l’intérêt social ?
La conformité de l’acte à l’intérêt social de la SCI
Par principe, le cautionnement doit, en plus de respecter les conditions précédentes, être conforme à l’intérêt social. L’acte ne sera pas conforme à l’intérêt social de la société s’il expose la société à un risque important ou si elle n’en tire aucune contrepartie.
Ainsi, la nullité est encourue même si la possibilité d’accorder un cautionnement a été intégrée dans l’objet social (Cass. com., 23 sept. 2014, n°13-17.347). En effet, pour la Cour de cassation, la sûreté accordée par une société civile en garantie de la dette d’un associé n’est pas valide « dès lors qu’étant de nature à compromettre l’existence même de la société, elle est contraire à l’intérêt social (…) qu’il en est ainsi même dans le cas où un tel acte entre dans son objet statutaire ».
Par exemple, il faudra que le montant du prêt cautionné ne soit pas supérieur à l’actif de la société de la SCI, notamment l’immeuble de celle-ci, auquel cas l’acte sera considéré comme contraire à l’intérêt social car il pourrait mettre en danger la société.
Néanmoins, il en sera autrement si la SCI en tire une contrepartie. En effet, l’acte de cautionnement qui engage l’entier patrimoine de la SCI mais qui lui permet d’acquérir un patrimoine immobilier ainsi que de percevoir des loyers commerciaux par le débiteur cautionné, a été reconnu comme conforme à l’intérêt social (Cass. com., 2 nov. 2016, n°16-10.363).
Mais encore, lorsque l’engagement financier garanti était nécessaire pour conjurer un risque de disparition de l’ensemble des sociétés du groupe (Com. 10 févr. 2015, n° 14-11.760) ou encore à favoriser le financement d’une société mère (Cass. 2 nov. 2016).
Il appartient au juge d’apprécier le caractère réel de cette contrepartie pour établir l’intérêt que peut avoir la SCI à souscrire l’acte de garantie. Ce qui ne sera pas le cas si la SCI n’a aucun intérêt à garantir le prêt d’une SARL exploitant un bien inoccupé. (Com. 14 févr. 2018, n° 16-19.762).