Parasitisme économique et confusion – Régime juridique

par | 25 Mai, 2022 | Articles droit de la concurrence, Exprime Avocat

Parasitisme économique

Le parasitisme économique se définit comme l’ensemble des comportements par lesquels un agent économique s’immisce dans le sillage d’un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire.

C’est un comportement déloyal qui vise à capter l’avantage économique d’autrui. Le parasite va exploiter le travail, les idées, la publicité ou la notoriété d’autrui. Celui-ci va bénéficier d’un avantage injustifié en profitant des investissements réalisés par le parasité.

Ce comportement peut prendre différente forme que ce soit par une confusion fautive liée à la reproduction ou imitation de signes et de produits, mais aussi indépendamment de tout risque de confusion.

Le parasitisme peut intervenir entre concurrent et relève dans ce cas de la concurrence déloyale, ou entre non-concurrents et constitue des agissements parasitaires.

De tels comportements sont susceptibles d’engager la responsabilité de son auteur sur le fondement de l’article 1240 du code civil, comme toute action en concurrence déloyale.

Les conditions du parasitisme

Le parasitisme implique de démontrer la volonté de se placer dans le sillage d’une entreprise et de porter atteinte à sa valeur économique.

L’intention de se placer dans le sillage d’une entreprise

L’action en parasitisme nécessite de démontrer la volonté du parasite de se placer dans le sillage de l’entreprise parasitée.

« Attendu qu’en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser la volonté de la société X de s’inscrire dans le sillage de la société Y, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision » (Cass. com., 4 févr. 2014, n°13-10.039).

Le fait d’exiger une volonté délibérée de se placer dans le sillage d’une entreprise peut soulever la question de savoir si la faute du parasité doit être intentionnelle ou pas.

Par principe, l’action en concurrence déloyale n’exige pas de démontrer l’intention de la faute. En effet, il est de jurisprudence constante que l’action en concurrence déloyale n’exige pas la constatation d’un élément intentionnel (Cass. com., 16 janv. 2001, n°98-23.101). Or la volonté délibérée de se placer dans le sillage d’une entreprise s’assimile à une intention fautive. L’action en parasitisme serait donc une exception, et il faudra donc démontrer le caractère intentionnel de la faute, contrairement aux autres actions en concurrence déloyale.

L’intentionnalité de la faute sera appréciée au regard des éléments matériels, par exemple en cas de reproduction des mêmes caractéristiques d’un produit à succès (vente de cornets de chocolats – Cour de cass. 5 juillet 2016, 14-17.783).

La confusion parasitaire

La confusion parasitaire vise à profiter de l’avantage économique d’une entreprise en instaurant une confusion dans l’esprit de la clientèle pour qu’elle se trompe sur l’identité, les produits ou les services de cette entreprise.

Tous les éléments d’une entreprise sont susceptibles d’être imités ou reproduits. Il est néanmoins possible de distinguer trois grandes catégories :

  • la reproduction ou imitation des signes de l’entreprise,
  • des produits de l’entreprise, ainsi que
  • les éléments de communication de l’entreprise.

Reproduction ou imitation des signes de l’entreprise

Les signes de l’entreprise sont l’ensemble des éléments qui permettent au consommateur de distinguer une entreprise de ses concurrents. Ces signes distinctifs permettent d’identifier l’entreprise, il s’agit du nom commercial, la dénomination sociale, les noms de domaine, l’enseigne ou encore les marques.

Les critères requis

La sanction de l’imitation ou de reproduction de ces signes se fonde sur la confusion ou le risque de confusion. C’est-à-dire que la sanction n’est pas automatique et les juges prennent en compte plusieurs critères, à savoir l’originalité du signe, l’activité de l’entreprise ou encore la zone géographique de l’activité. Ces éléments vont permettre d’établir l’existence d’une confusion ou risque de confusion.

Ainsi, les juges peuvent écarter l’action en concurrence déloyale si le terme n’est pas original. Par exemple concernant le terme « LOFT », d’usage courant en matière immobilière pour désigner un certain type d’habitation, dont l’utilisation ne peut être considéré comme fautive (CA d’Aix-en-provence, 27 juin 2019, nº 17/01953).

Toutefois, l’originalité n’est pas une condition au bien-fondé de l’action « mais un facteur susceptible d’être pertinent pour l’examen d’un risque de confusion » (Cass.com 6 dec. 2016 n°15-18470). Ainsi l’imitation de la dénomination sociale d’une société désignée « Cocktail », qui constitue pourtant un terme générique, peut être sanctionnée en concurrence déloyale et parasitaire, si les deux sociétés exercent, dans la même zone géographique, et sur le même secteur d’activité (Cass. 27 janvier 2009, 07-15.971).

L’évolution du contentieux via le net

Le nom de domaine est un élément important de l’identification d’une entreprise. Les investissements liés au référencement et autre publicité peuvent inciter certain concurrent à se placer dans le sillage d’un nom de domaine. La simplicité de l’achat d’un nom de domaine similaire à un nom de domaine à forte notoriété peut être tentant pour un concurrent.

Ce sera notamment le cas du typosquattage qui consiste à enregistrer et utiliser des noms de domaine très proches d’un concurrent, exemple dans le commerce du pneu (CA Lyon, 31 janvier 2008, nº 06/05922) ou encore de manière plus classique d’acheter un nom de domaine avec une différence sur l’extension (ex : « annoncesvacances.fr » ou « annonces-vacances.com »).

Ces comportements sont sanctionnés mais il en sera différemment si les sociétés n’exercent pas dans le même secteur d’activité :

« Attendu que pour dire que la société Soficar, en déposant le nom de domaine “locatour.com” a porté atteinte au nom de domaine “locatour.fr” déposé par la société Le Tourisme moderne, l’arrêt retient que le simple enregistrement en “.com” d’un nom de domaine préalablement enregistré en “.fr” constitue une atteinte aux droits du titulaire sur ce nom de domaine ;

Attendu qu’en se déterminant ainsi, sans rechercher si les sociétés en litige exerçaient des activités identiques ou concurrentes et s’il en résultait un risque de confusion, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision » (Cour de cassation 13 décembre 2005, Pourvoi nº 04-10.143).

Le nom de domaine ne doit pas porter atteinte à un autre signe appartenant à un concurrent, par exemple son enseigne. Ainsi, le choix du nom de domaine www.rennesimmo.com a été jugé comme déloyale à l’égard d’une agence immobilière dont l’enseigne était « Rennes immobilier » qui se faisait appeler « Rennes immo » indépendamment de l’existence d’un nom de domaine.  (Cass. 7 juillet 2004, 02-17.416).

Il est important de préciser que ces signes font souvent l’objet d’un droit privatif, prévu par le code de la propriété intellectuel, et font souvent l’objet d’une condamnation sur le terrain de la contrefaçon de marque.

Enfin, le fait de détourner l’internaute par des liens commerciaux ou l’utilisation de mots-clés peut constituer une manœuvre parasitaire. Si la réservation du mot clé « PAP » désignant le site « particulier à particulier » n’est pas interdit en soi, il en est différemment si cette réservation vise à détourner la clientèle en dirigeant « directement l’internaute vers son site, profitant de façon déloyale, de la notoriété qui lui était attachée » (CA Paris 5 septembre 2013 – 11/08142).

Reproduction ou imitation des produits de l’entreprise

Une reproduction ou imitation déloyale

En principe, les produits font l’objet d’une protection au titre du brevet, dessin ou modèle et bénéficient donc d’un droit privatif protégé par l’action en contrefaçon. Si l’objet n’a pas ou plus cette protection, l’action en concurrence déloyale pour parasitisme est toujours possible. 

En l’absence de droits privatifs sur une création, le fait de commercialiser un produit qui en constitue l’imitation ou la reproduction, même servile, n’est pas, en soi, constitutif d’un acte de concurrence déloyale mais procède du principe de la liberté du commerce et de la libre concurrence.

La reproduction ou imitation de produits ne devient répréhensible que si elle s’accompagne de procédés déloyaux (CA Versailles, 29 mars 2001, n°1998-572). Il convient de démontrer que cette reproduction est fautive, c’est-à-dire entrainant un risque de confusion (Cass .com 10 février 2009 n°07-21912).

Il revient donc au parasité de démontrer que la reproduction ou imitation entraine un risque de confusion compte tenu des caractéristiques du produit. Ce sera notamment le cas lorsque les caractéristiques reprises ou imitées présentent un caractère original, unique ou distinctif (Cour de cass. 5 juillet 2016, 14-17.783). 

Cependant, comme en matière de signes pour les entreprises, l’originalité du produit n’est pas une condition nécessaire mais « l’un des facteurs possibles d’appréciation de l’existence d’une faute par création d’un risque de confusion ». (Cass. 12 juin 2007, Pourvoi nº 05-17.349).

 Peu importe le caractère intentionnel, la vente de produit identique à un concurrent peut constituer un acte de concurrence déloyale en cas de confusion, que la faute soit intentionnelle, de négligence ou d’imprudence (Cass. com 12 nov. 1986 et  Cass. com., 2 juill. 1991, n°89-14.042). 

Le cas des produits fonctionnelles ou techniques

Si en principe, la copie servile de produits est fréquemment condamnée sur le fondement de la concurrence déloyale/parasitaire, il en va différemment des produits de rechange ou adaptables au matériel original.  Ainsi, « la compatibilité entre les produits des deux sociétés, obtenue par l’utilisation par la société Tomy France sur ses propres jouets de tenons identiques à ceux utilisés par la société Lego, ne constituait pas en elle-même, en l’absence de droit privatif au profit de la société Lego sur la partie litigieuse des produits, un acte de concurrence déloyale » (Cass. 29 mars 1994, nº 92-12.210).

Toutefois, « s’il n’est pas interdit de fabriquer et de commercialiser des produits compatibles avec ceux d’un concurrent, l’utilisation abusive de cet argument comme moyen de vente, constitue en la circonstance, à l’évidence, un comportement parasitaire fautif, puisqu’en agissant ainsi les sociétés intimées ont utilisé la notoriété et les efforts techniques et commerciaux de l’entreprise concurrente et ont cherché à accaparer la clientèle de celle-ci » (CA Versailles, 26 sept. 1996, n°5457/94). 

A contrario sur la validité de la mention « compatible » sur des boîtes de jeux sans référence à la marque originale (Cass. com., 26 févr. 2002, n°99-13.774

L’emballage d’un produit peut également porter à confusion et entrainer une condamnation pour parasitisme. Par exemple pour des boîtes de chocolats similaires ou de boites de beurre sous forme de cloche portant à confusion. Il en sera autrement si l’imitation est banale ou répond à des impératifs techniques, règlementaires ou informatifs.

La reproduction ou imitation des éléments de communication

Pour rappel une idée n’est pas protégeable. Cependant, une publicité similaire à celle de son concurrent peut être condamnable.

Il en sera ainsi de la reprise visuelle d’éléments publicitaires « l’idée d’associer le fruit et la marque a la même évocation, qu’elle soit utilisée par l’une ou l’autre de ces sociétés, et que, mise en oeuvre à la fin du film, elle joue un rôle de signature que le public gardera en mémoire; qu’il en déduit que les ressemblances entre les visuels en présence engendrent, dans l’esprit du consommateur raisonnablement attentif et avisé, un risque de confusion, que la différence des marques apposées n’atténue pas ; qu’en l’état de ces constatations et appréciations souveraines, la cour d’appel a pu retenir que la reprise par la société Pepsico de l’idée publicitaire de la société Andros caractérisait un acte de concurrence déloyale » (Cour de cassation, Chambre commerciale, Arrêt nº 999 du 24 novembre 2015, Pourvoi nº 14-16.806).

Un slogan publicitaire original peut également entrainer un risque de confusion et être sanctionné. « le slogan « gros volumes = petits prix », bien connu du grand public, est identifié par les consommateurs et les professionnels de la grande distribution comme attaché à l’enseigne ; qu’il ajoute que cette formule, lapidaire et percutante, a fait l’objet d’efforts de promotion et d’investissements de la part de la société Cora, qui a effectué de multiples opérations publicitaires ayant contribué à son lancement et sa réputation ; qu’il constate ensuite que la formule syntaxique utilisée par la société Auchan est identique à celle utilisée par la société Cora, peu important que le signe « = » soit remplacé par une virgule, la juxtaposition de deux groupes de mots équivalant à un signe égal, et que les formules de la société Auchan « prix mini sur gros volumes » et « gros volumes à prix mini » ont une consonance et une résonnance équivalentes à celles de la société Cora ». (Cour de cassation, Chambre commerciale, Arrêt nº 572 du 9 juin 2015, Pourvoi nº 14-11.242).

En outre, l’imitation ou la reproduction d’autres éléments tels que la présentation physique de l’intérieur ou l’extérieur d’un établissement, tout comme la présentation d’un site internet, peut également être sanctionné.

Régime de la responsabilité

Toute personne qui utilise pour son propre profit, le succès commercial et industriel d’un autre, commet une faute susceptible d’engager sa responsabilité civile. Il sera nécessaire de démontrer la faute, le lien de causalité et le préjudice subi. Voir concurrence déloyale.

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