L’abus de position dominante : Principes généraux

par | 2 Mar, 2022 | Articles droit de la concurrence, Exprime Avocat

Abus de position dominante

L’abus de position dominante consiste, pour une entreprise détenant  une position dominante sur un marché déterminé, de profiter de sa situation pour adopter certains comportements nocifs à l’égard de la concurrence présente sur ce marché.

Ainsi, sera sanctionner le comportement visant à éliminer, à contraindre ou encore à dissuader tout concurrent d’entrer ou de se maintenir sur ce marché ou un marché connexe, faussant ainsi la concurrence.

Il s’agit d’une pratique anticoncurrentielle sanctionnée par l’article L. 420-2 du Code de commerce et également prévu par l’article 102 du TFUE.

La position dominante d’une entreprise se caractérise par l’évaluation du degré de pouvoir qu’elle détient sur un marché déterminé (CJCE, 14 févr. 1978 et  Cass. ch. com., 24 nov. 2009, n°07-21.739). Une situation de position dominante en soi n’est pas illicite. En effet, il ne saurait être reproché à une entreprise de conquérir, par ses propres mérites une telle position (CJUE 17 février 2011 aff. C-59/06).

Il ne s’agit donc pas de sanctionner la position dominante de l’entreprise mais le comportement abusif de l’entreprise sur le marché dominé.

Les éléments constitutifs de l’abus de position dominante

L’abus de position dominante suppose l’existence de trois éléments.

  • L’existence d’une entreprise ou un groupe d’entreprises sur un marché disposant d’une position dominante;
  • Une exploitation abusive de cette position ;
  • Un objet ou un effet restrictif de concurrence sur un marché.

La détermination de ces éléments passe nécessairement par l’identification d’une entreprise ou d’un groupe d’entreprise (a), la définition d’un marché (b) et enfin, la caractérisation d’un comportement illicite (c).

L’existence d’une entreprise ou un groupe d’entreprises sur un marché dominé

La notion d’« entreprise » est la même que pour l’application des articles 101 TFUE et L. 420-1 du code de commerce. L’entreprise ou le groupe d’entreprise doit exercer une activité commerciale, économique ou spéculative.

Il peut s’agir aussi bien d’une personne de droit privé que d’une personne de droit public et ce, quelle que soit la nature de ses activités (activités de production, de distribution et de service).

La caractérisation du marché

L’entreprise dominante doit agir sur un marché identifié, connu sous l’appellation de marché pertinent. Ce marché est celui à prendre en considération pour apprécier l’incidence de la pratique abusive. 

Sa délimitation se fait en fonction de la localisation géographique, des produits et des parts de marché détenues par l’entreprise. Le fait d’établir une délimitation appropriée du marché pertinent est d’une importance essentielle. En effet, il est de jurisprudence constante que « les possibilités de concurrence ne pouvant être appréciées qu’en fonction des caractéristiques des produits en cause ».

Ce principe connait une exception en cas de marché connexe. Par exemple, les marchés de l’électricité et du gaz ont pu être considérés comme présentant un lien de connexité (Aut. conc., déc. n°17-D-06, 21 mars 2017, Engie).

Un comportement abusif

L’entreprise en position dominante est tenue d’une responsabilité particulière. Cela consiste à ne pas porter atteinte, par son comportement, à une concurrence effective et non faussée sur le marché (CJCE 2 avr 2009 aff. C-202/07 france Télécom / Commission).

La notion d’abus en droit de la concurrence a été déterminée par l’arrêt “Intel” du 6 septembre 2017. Cette décision apporte des précisions importantes sur cette notion. Elle indique qu’il est interdit de mettre en oeuvre des pratiques produisant des effets d’éviction pour ses concurrents considérés comme étant aussi efficaces qu’elle-même, en recourant à des moyens autres que ceux qui relèvent d’une concurrence par le mérites.  

L’entreprise dominante pourra donc faire disparaître la concurrence, sans commettre d’abus, si l’entreprise concurrente est moins efficace sur le marché. Il s’agit en effet de sanctionner des pratiques qui ne seraient pas équitables compte tenu de la position dominante d’une entreprise et de sa responsabilité particulière à l’égard des entreprise aussi efficace qu’elle. 

D’une manière globale, l’entreprise dominante peut exercer deux types d’abus.

L’abus d’exploitation de sa position, qui consiste à pratiquer des prix excessifs ou refuser de fournir ses concurrents. Dans ce cas, l’entreprise dominée ne sera pas évincée mais subira une pratique anticoncurrentielle (CJUE 19 avr. 2018 aff. C-525/16 sur les prix inéquitables par l’application de différences tarifaires).

Les abus d’éviction qui visent à évincer la concurrence aussi efficace qu’elle par des moyens autres que ceux de la concurrence par le mérite. Il s’agit notamment des prix prédateurs ou des rabais de fidélité.    

Enfin, il est parfois possible de justifier d’agissements abusifs, soit que le comportement est objectivement nécessaire, soit que l’effet d’éviction peut être contrebalancé, voire surpassé, par des avantages en termes d’efficacité qui profitent également aux consommateurs » (CJUE, 27 mars 2012, aff. C-209/10).

A cet égard, l’article L. 420-4, III du code de commerce prévoit que les articles L. 420-2-1 et L. 420-2-2 ne sont pas applicable pour « les accords ou pratiques dont les auteurs peuvent justifier qu’ils sont fondés sur des motifs objectifs tirés de l’efficacité économique et qui réservent aux consommateurs une partie équitable du profit qui en résulte ».

La répression de l’abus de position dominante

Une fois l’abus caractérisé, son auteur s’expose à de lourdes sanctions aussi bien en droit interne qu’en droit communautaire.

Les sanctions en droit interne

En droit interne, la victime du comportement abusif dispose du droit d’intenter trois types d’actions. Rien ne lui empêche d’ailleurs de les exercer de façon cumulative.

D’abord, elle peut saisir l’Autorité de la concurrence en vue d’obtenir le prononcé de mesures conservatoires, des injonctions d’abstention ou de modification contre l’auteur de l’abus de position dominante. Ladite Autorité peut également infliger des sanctions pécuniaires à l’entreprise à l’origine du comportement abusif prévue par l’article L. 464-2 du code de commerce.

La victime peut également intenter une action en nullité devant les juridictions judiciaires sur le fondement de l’article L. 420-3 du code de commerce.

Outre une action en nullité, les infractions au droit de la concurrence peuvent également être poursuivies par une action en responsabilité civile (art.L.481-1 C.com). Cette action peut aboutir à la condamnation à des dommages et intérêts. C’est une responsabilité civile délictuelle qui nécessite d’établir une faute, un dommage et un lien de causalité.

Concernant la faute,  une pratique anticoncurrentielle est présumée établie de manière irréfragable dès lors que son existence et son imputation ont été constatées par l’Autorité de la concurrence (C. com., art. L. 481-2).

Sur le préjudice, l’action en responsabilité en cas d’abus de position dominante impose de démontrer l’existence du préjudice, contrairement à l’entente dont le préjudice est présumé (L.481-7 Code de commerce). 

Enfin, la victime de l’abus peut agir au pénal contre toute personne physique ayant pris une part personnelle et déterminante dans la conception, l’organisation ou la mise en œuvre des pratiques visées à l’article L. 420-2 (C. com., art. L. 420-6).

Les sanctions en droit européen

En cas d’abus de position dominante, la commission européenne peut se saisir d’office. Elle peut également être saisie par une plainte déposée par un État membre ou par une personne de droit privé ayant un intérêt légitime.

Celle-ci a un pouvoir d’enquête et de sanction. Dès lors, la Commission pourra ordonner des mesures provisoires en d’urgence ; mener une enquête approfondie ou encore prononcer des sanctions telles qu’injonctions de cesser l’infraction, amendes et astreintes.

L’abus de position dominante peut entrainer des condamnations à des montants records, comme l’illustre la condamnation de Google à 4,34 milliards d’euros dans l’affaire Google Android en 2018, ou de 1,49 milliards d’euros dans l’affaire Google AdSense en 2019 (UE 18 juill. 2018, AT 40099, et Google Android – UE 20 mars 2019 AT 40411).

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