Responsabilité des hébergeurs internet : retrait d’un contenu illicite

par | 30 Oct, 2022 | Articles droit des médias, Exprime Avocat

Responsabilité des hébergeurs internet

La responsabilité des hébergeurs internet est prévue par la Loi pour la Confiance en l’Économie Numérique (LCEN) du 21 juin 2004 transposant la directive du 8 juin 2000 relative au commerce électronique.

En principe, « la communication au public par voie électronique est libre » (art.1. LCEN). Toutefois, cette liberté se trouve limitée par de nombreux textes, et notamment l’alinéa 2 de l’art.1 LCEN, la loi du 16 juillet 1881 ou encore le code pénal.  

Atteinte au droit à la vie privé, propos diffamatoire, dénigrement ou atteinte au droit d’auteur, le responsable de l’édition d’un contenu illicite pourra être poursuivi et sanctionné. Toutefois, il est fréquent que l’auteur d’un contenu illicite ne soit pas identifié et que les démarches pour faire cesser l’infraction ne peuvent aboutir.

Dès lors, il s’agit de savoir si les « prestataires techniques de l’internet » et notamment l’hébergeur, peut être tenu responsable des infractions liées à la liberté de communication sur internet. Pour cela, il convient de définir la notion d’hébergeur et le régime de droit applicable.

Définition et régime juridique de l’hébergeur internet

Les intermédiaires peuvent être qualifiés soit d’hébergeurs soit d’éditeurs. La distinction est décisive puisque l’éditeur est responsable de plein droit du contenu publié sur le site internet alors que l’hébergeur bénéficie d’un régime spécial plutôt favorable.  

Sur la difficulté de définir la notion d’hébergeur :

Les hébergeurs peuvent être définis comme toutes “les personnes physiques ou morales qui assurent, même à titre gratuit, pour mise à disposition du public par des services de communication au public en ligne, le stockage de signaux, d’écrits, d’images, de sons ou de messages de toute nature fournis par des destinataires de ces services ». (article 6-I-2 de la LCEN du 21 juin 2004).

Le critère essentiel qui définit l’hébergeur est celui du stockage. Si l’opérateur se limite à une activité de stockage, cela ne pose aucune difficulté, il sera reconnu comme un hébergeur et non comme éditeur.

La notion d’hébergeur peut-être plus délicate lorsque l’opérateur propose plusieurs prestations. Dans ce cas, il faudra séparer l’activité de mise à disposition d’un espace de stockage informatique, de celle qui consiste à accueillir et gérer du contenu.

Ainsi, l’évolution jurisprudentielle nous montre que le juge fonde son critère de distinction sur la nature de l’activité et sur l’implication de l’intermédiaire dans les éléments présents sur la plateforme (CJUE Arrêt 23 mars 2010 C-236/08).

De ce fait, l’hébergeur ne peut avoir qu’un rôle purement technique, passif voire automatique sous peine d’être requalifié comme un éditeur. Ainsi, l’hébergeur n’est supposé ni apprécier ni connaître le contenu ou la nature des éléments stockés, transmis ou encore publiés. Il en sera ainsi par exemple des sociétés fournissant exclusivement des espaces de données informatiques, comme par exemple, IONIOS, OVH…

Les services complémentaires au stockage

La difficulté intervient lorsque l’intermédiaire propose des services d’agrégation de sites internet, de gestion de contenu, de marketplace, de forum ou met en place des services de publicités. Il en sera ainsi des moteurs de recherches ou sites tels que Google, Dailymotion ou encore Tweeter.  

En principe, la qualité d’hébergeur sera reconnu si celui-ci n’assiste pas ses clients et qu’il s’abstient de mettre en place une optimisation des offres disponibles (CJUE, 12 juillet 2011, L’Oréal / eBay international C324/09).

Plus récemment, la cour de cassation a reconnu qu’une plateforme de vente de billets, qui optimise la présentation des offres sur son site et exerce un rôle actif, ne pouvait pas bénéficier du régime de la responsabilité limitée des hébergeurs (arrêt de la FFF contre Ticketbis – Cour de cassation, 1er juin 2022, Pourvoi nº 20-21.744).

En matière de qualification d’hébergeur, la jurisprudence ne semble pas encore bien établie et fait l’objet de nombreuses décisions. Pour des exemples (arrêts Wikipédia CA Paris, pôle 1er, 3ème ch., 14 juin 2016 – TGI Paris, 10 avr. 2009 Daily Motion).

L’enjeu de la qualification est essentiel. En effet, si la plate-forme est reconnu comme un simple hébergeur, celle-ci bénéficie d’un régime de responsabilité spécial. 

Sur le régime applicable

Le régime de responsabilité des hébergeurs est prévu par l’article 6-I-2.

« Les personnes physiques ou morales qui assurent, même à titre gratuit, pour mise à disposition du public par des services de communication au public en ligne, le stockage de signaux, d’écrits, d’images, de sons ou de messages de toute nature fournis par des destinataires de ces services ne peuvent pas voir leur responsabilité civile engagée du fait des activités ou des informations stockées à la demande d’un destinataire de ces services si elles n’avaient pas effectivement connaissance de leur caractère illicite ou de faits et circonstances faisant apparaître ce caractère ou si, dès le moment où elles en ont eu cette connaissance, elles ont agi promptement pour retirer ces données ou en rendre l’accès impossible ».

Dès lors, l’hébergeur n’est pas responsable du contenu illicite s’il n’en a pas été informé.

Sa responsabilité ne pourra être engagé que lorsqu’il a eu connaissance du caractère illicite du contenu et qu’il n’a pas agi promptement.

En cas de contenu illicite, il est donc nécessaire d’en informer l’hébergeur, conformément à l’article 6 al.5 de la LCEN. Cet article prévoit les mentions obligatoires devant figurer dans la notification. Initialement, le législateur appréciait ces mentions ad probationem. Cependant, la jurisprudence s’oriente peu à peu vers un formalisme ad valida tem.

La notification a plusieurs effets. D’une part, elle fait naître une obligation de contrôle et de retrait auprès de l’hébergeur. D’autre part, en cas de silence, elle devient une preuve de sa faute qui permet d’engager sa responsabilité. (4ème ch. 6 mai 2009, Dailymotion c/ Nord-Ouest production et autres).

Dès que l’hébergeur reçoit la notification, il doit agir « promptement ». Dans une ordonnance de référé en date du 13 mars 2008, le Président du tribunal de grande instance a considéré que l’action prompte était immédiate dans un délai de vingt-quatre heures (TGI Toulouse, Ordonnance de référé du 13 mars 2008 Krim K. c/ Pierre G. et Amen).

Contre la réapparition du contenu illicite ?

Parallèlement au retrait du contenu préjudiciable se pose la question d’une obligation de « non-réapparition ». Issue du droit américain, cette mesure est communément désignée sous la formule « take down, stay down » (notice and stay down, DMCA américain de 1998). On constate qu’elle ne fait pas l’objet d’un consensus au sein de la jurisprudence française.

Le 14 décembre 2010, le tribunal de grande instance de Créteil se prononce en faveur du respect de cette règle. Cette décision sera confirmée à plusieurs reprises (TGI Créteil, 14 déc. 2010, INA c/ YouTube, no 06/12 815. – Paris).

Toutefois, cette reconnaissance ne crée aucune obligation de surveillance pour l’hébergeur en dehors des notifications.

Ce rappel est formulé par la Cour de cassation dans les décisions Google Vidéo et Google Images rendus le 12 juillet 2012 (Civ. 1re, 12 juill. 2012, nos 11-13.666 , 11-13.669 , 11-15.165  et 11-15.188). Ainsi, la cour de cassation refuse de reconnaitre l’application du principe de « take down, stay down ». L’hébergeurs n’a donc pas d’obligation générale de surveillance et de filtrage.

Cependant, en cas de contenu supprimé au regard du droit d’auteur, celui-ci devra mettre en oeuvre des moyens pour empêcher l’accès au contenu protégé (Civ 1ère, 12 juillet 2012, 11-20.358).

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