Lorsqu’un actionnaire unique détient une société, il peut être tenté de se verser des dividendes en fin d’exercice. Cependant, cette décision ne doit pas être prise à la légère. L’attribution de dividendes obéit à des principes juridiques stricts, qu’il convient de bien comprendre pour éviter tout risque fiscal ou social. Cet article fait le point sur les règles essentielles que les chefs d’entreprise doivent maîtriser pour sécuriser ces opérations.
Définition et cadre légal du dividende
Qu’est-ce qu’un dividende ?
Le dividende constitue la part des bénéfices distribuée aux associés ou actionnaires d’une société. Pour l’actionnaire unique, il s’agit donc du paiement d’une partie du résultat net qu’il s’attribue à l’issue de l’exercice comptable, en sa qualité de détenteur de toutes les parts sociales ou actions.
Cette distribution n’est possible qu’en respectant certaines conditions strictes inscrites dans le Code de commerce, notamment les articles L232-10 à L232-18.
Bénéfices distribuables : l’indispensable résultat positif
Le versement de dividendes suppose que la société réalise un bénéfice distribuable au terme de l’exercice. Ce bénéfice correspond au résultat net comptable, diminué des pertes antérieures et des dotations aux réserves légales et statutaires, auquel peut s’ajouter le report à nouveau bénéficiaire antérieur.
En l’absence de bénéfice distribuable, aucune distribution ne peut être envisagée sans créer un risque juridique majeur. En effet, le versement de dividendes sur des fonds inexistants peut être considéré comme un abus de biens sociaux.
Les étapes de distribution dans une société à associé unique (SASU ou EURL)
Pour les SASU (Société par Actions Simplifiée Unipersonnelle) ou EURL (Entreprise Unipersonnelle à Responsabilité Limitée), le schéma de distribution diffère légèrement des sociétés pluripersonnelles, en raison de la concentration du pouvoir de décision.
Établissement des comptes annuels
À la clôture de chaque exercice, l’actionnaire unique doit d’abord procéder à l’ approbation des comptes annuels dans un délai de six mois. Dans les SASU ou EURL, cette approbation se traduit par une simple décision unilatérale de l’associé unique, souvent rédigée sous forme d’un procès-verbal.
Affectation du résultat
Une fois les comptes approuvés, l’associé unique décide de l’ affectation du résultat : mise en réserve, report à nouveau, ou distribution de dividendes. La décision doit être formalisée par écrit puis conservée dans le registre des décisions.
Respect des formalités fiscales et sociales
Le versement des dividendes implique également le respect de plusieurs déclarations :
- Déclaration fiscale n°2777-D : déclaration des revenus mobiliers et prélèvement des impôts correspondants.
- Paiement des prélèvements sociaux : à hauteur de 17,2 % sur les dividendes versés.
Il convient également d’identifier la qualité sociale de l’associé unique (travailleur non salarié ou assimilé salarié), car cela peut emporter des conséquences différentes sur le plan social, notamment si les dividendes excèdent une certaine fraction du bénéfice.
Dividendes et charges sociales : attention en EURL soumise à l’IR ou à l’IS
En EURL à l’IR : une rémunération plutôt qu’un dividende
Lorsque l’actionnaire unique d’une EURL est une personne physique soumise à l’impôt sur le revenu (IR), les bénéfices sont taxés directement entre ses mains. Ainsi, le paiement du bénéfice ne prend pas la forme d’un dividende mais d’une rémunération du dirigeant, soumise aux cotisations sociales du régime des indépendants.
En EURL ou SASU à l’IS : des dividendes soumis à régime mixte
En cas d’option à l’impôt sur les sociétés (IS), les dividendes versés à l’associé unique sont soumis à :
- l’impôt sur le revenu sous forme de prélèvement forfaitaire unique (PFU) au taux de 30 % (12,8 % d’impôt + 17,2 % de prélèvements sociaux) ;
- les cotisations sociales en partie si l’associé unique est gérant majoritaire d’une EURL : les dividendes perçus pour la part excédant 10 % du capital social, des primes d’émission et des sommes versées en compte courant sont alors assujettis aux cotisations sociales TNS.
Optimisations et précautions à prendre
Planification des distributions
Dans un objectif d’optimisation fiscale, il est recommandé de planifier les versements de dividendes afin d’éviter une fiscalité trop lourde en fin d’exercice. Il peut être pertinent d’alterner une rémunération suffisante (déductible fiscalement pour la société) et une distribution modérée de dividendes.
Attention à l’abus de droit
Le recours trop systématique aux dividendes au détriment de la rémunération peut attirer l’attention de l’administration fiscale. Il existe un risque d’abus de droit fiscal en cas de montage visant uniquement à échapper à l’assujettissement aux cotisations sociales.
Prévoir une trésorerie suffisante
Le versement de dividendes ne doit jamais mettre en péril la trésorerie de la société. Bien que le bénéfice comptable puisse exister, il convient de s’assurer que l’entreprise dispose des liquidités nécessaires pour faire face à ses autres engagements (charges, salaires, fournisseurs, etc.).
Conclusion : sécuriser la distribution et anticiper les impacts
La distribution de dividendes dans le cadre d’une société à associé unique (SASU, EURL) permet à l’entrepreneur de bénéficier des fruits de son activité. Toutefois, cette démarche doit être solidement encadrée tant sur le plan comptable, juridique que fiscal. Une mauvaise appréciation des règles peut entraîner des sanctions fiscales, redressements URSSAF, voire des poursuites pénales.
Ainsi, faire appel à un professionnel du droit reste essentiel pour sécuriser ces opérations sensibles et garantir la conformité de votre organisation.
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