La cession d’un fonds de commerce soulève la question du sort des dettes antérieures et de l’éventuelle solidarité entre le vendeur et l’acquéreur. Contrairement à certaines idées reçues, le principe est celui de l’absence de solidarité civile, sous réserve de dérogations prévues par la volonté des parties ou par la loi, notamment en matière fiscale.
Principe : pas de solidarité civile pour les dettes antérieures au transfert du fonds
En cas de cession de fonds de commerce, les créances et dettes nées avant la cession sont, par principe, exclues du périmètre de la vente, sauf stipulation contraire de l’acte.
L’acquéreur n’est donc pas tenu des dettes antérieures du vendeur et il n’existe pas de solidarité passive entre eux.
En conséquence, un fournisseur du vendeur ne peut pas poursuivre l’acquéreur pour obtenir le paiement de factures émises avant la cession. La jurisprudence, relayée par la doctrine professionnelle, a confirmé cette règle : l’acquéreur ne peut pas être poursuivi par un créancier du vendeur au titre d’une dette antérieure à la cession.
Cession de dettes : conditions et effets (éventuelle solidarité du vendeur avec l’acquéreur)
La cession des dettes du vendeur à l’acquéreur est juridiquement possible. Toutefois, elle suppose :
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l’accord exprès du créancier,
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et un acte écrit à peine de nullité.
Le vendeur ne sera libéré que si le créancier donne son consentement exprès.
À défaut, le vendeur demeure tenu solidairement au paiement de la dette avec l’acquéreur, sauf clause contraire convenue entre eux.
La doctrine spécialisée souligne que le transfert de dette n’est valable qu’avec l’accord du créancier et rappelle qu’à défaut de libération expresse, le vendeur reste solidairement responsable du paiement.
Solidarité fiscale légale et temporaire de l’acquéreur avec le vendeur
Au-delà du droit civil, la loi fiscale instaure une solidarité spécifique.
En vertu de l’article 1684, 1 du Code général des impôts, l’acquéreur est solidairement responsable avec le vendeur du paiement de certains impôts directs, à concurrence du prix du fonds et pour une durée limitée.
Cette solidarité fiscale s’applique notamment à l’impôt sur les bénéfices réalisés par le vendeur l’année de la cession. Elle peut durer jusqu’à 165 jours, en fonction des délais déclaratifs et de mise en recouvrement, ce qui justifie en pratique la conservation du prix pendant cette période.
Indisponibilité du prix, opposition des créanciers et séquestre
Pour protéger les créanciers du vendeur, la loi prévoit :
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une publicité de la vente (annonce légale + BODACC),
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et un droit d’opposition au paiement du prix, dans les 10 jours suivant la publication.
Le prix de vente est donc indisponible pendant environ 25 jours minimum, ce délai étant prolongé en cas d’oppositions.
Le paiement effectué au vendeur avant l’expiration du délai d’opposition est inopposable aux créanciers, y compris à ceux qui n’ont pas formé opposition. L’acquéreur peut donc être contraint de payer une seconde fois le prix lors de la répartition entre créanciers.
En pratique, le prix est confié à un séquestre (avocat ou notaire) qui procède :
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au règlement des créanciers inscrits et opposants,
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puis à la remise du solde au vendeur.
Cette indisponibilité se combine avec la solidarité fiscale, ce qui conduit à conserver le prix pendant une période pouvant aller jusqu’à 5 mois et demi.
Règlement des litiges
En cas de contentieux avec les créanciers, plusieurs voies sont possibles. La médiation ou transaction amiable entre les parties. Le cas échéant, l’action judiciaire devant le tribunal de commerce en cas de refus de paiement ou désaccord
Face au risque de responsabilité, il est recommandé de faire appel à un avocat spécialisé en cession de fonds de commerce pour rédiger l’acte de cession.
Une anticipation juridique permet de protéger toutes les parties et de limiter les risques de contentieux.
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