Définition : annulation
L’annulation (ou nullité) est une sanction juridique qui consiste à anéantir rétroactivement un acte, en le considérant comme inexistant. Elle s’applique principalement aux actes juridiques privés (contrats, testaments, délibérations d’assemblées), mais peut également concerner des actes juridictionnels (jugements ou arrêts annulés par une juridiction supérieure) ou des actes administratifs (décisions annulées par le juge administratif pour illégalité).
Contrairement à la résiliation, qui met fin à un contrat seulement pour l’avenir, l’annulation a un effet rétroactif, effaçant les effets produits par l’acte depuis son origine.
Les causes de l’annulation
L’annulation d’un contrat peut être prononcée lorsque l’acte juridique ne respecte pas les conditions de validité posées par le Code civil. Ces causes tiennent principalement au consentement, à la capacité des parties et au contenu du contrat.
Défaut de consentement (art. 1130 à 1144 C. civ.)
Le consentement doit être libre et éclairé. Il est vicié lorsqu’il est donné sous l’effet d’une erreur, d’un dol ou d’une violence :
- 
Erreur : elle entraîne la nullité seulement si elle porte sur les qualités essentielles de la prestation ou sur celles de la personne dans les contrats conclus intuitu personae (art. 1132 à 1136). 
 Exemple : achat d’un tableau en pensant qu’il est authentique alors qu’il s’agit d’une copie.
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Dol : il résulte de manœuvres frauduleuses ou de dissimulation intentionnelle d’informations déterminantes (art. 1137). Le dol suppose une volonté de tromper. 
 Exemple : un vendeur cache volontairement un vice connu de la chose vendue.
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Violence : elle est constituée lorsqu’une partie contracte sous la contrainte, la menace ou la pression (art. 1140 à 1144). Elle peut être physique, morale ou économique. 
 Exemple : signer un contrat sous la menace de divulguer des informations compromettantes.
Incapacité juridique (art. 1145 à 1152 C. civ.)
La capacité de contracter est une condition de validité du contrat. Lorsqu’une partie est incapable juridiquement, le contrat peut être annulé :
Mineur non émancipé : il ne peut contracter que pour des actes courants autorisés par la loi ou l’usage.
Majeur sous protection juridique : une personne sous tutelle doit être représentée par son tuteur pour les actes importants (art. 474 C. civ.).
Majeur sous curatelle : il doit être assisté par son curateur dans certains actes de disposition.
L’incapacité vise à protéger la partie vulnérable ; la nullité qui en découle est une nullité relative.
Objet ou contenu illicite (art. 1162 C. civ.)
Depuis l’ordonnance du 10 février 2016, la notion de cause a disparu du Code civil. Ce qui est sanctionné désormais, c’est le contenu du contrat.
Un contrat est nul si son contenu est illicite, c’est-à-dire contraire à la loi, à l’ordre public ou aux bonnes mœurs.
L’objet de l’obligation doit être déterminé et possible (art. 1163 C. civ.).
Exemples :
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un contrat ayant pour objet la vente de stupéfiants ; 
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une convention portant sur la rémunération d’un crime ou d’un délit ; 
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un pacte successoral prohibé (art. 722 C. civ.). 
Les types d’annulation
En droit, on distingue deux grands types de nullité : la nullité absolue et la nullité relative (art. 1179 du Code civil). Cette distinction permet de déterminer qui peut agir en annulation, quels sont les délais applicables et si la nullité peut être « couverte » ou non.
Nullité absolue
La nullité absolue sanctionne la violation d’une règle d’ordre public destinée à protéger l’intérêt général.
Elle vise à écarter du commerce juridique des actes qui contreviennent à des exigences fondamentales.
Qui peut agir ?
Toute personne ayant un intérêt à agir peut demander la nullité absolue, y compris les parties au contrat, leurs héritiers, leurs créanciers, voire le ministère public (art. 1180 C. civ.).
Exemples de causes de nullité absolue :
- contrat sans objet ou sans cause réelle (art. 1163 C. civ.) ;
- contrat ayant un objet illicite ou contraire à l’ordre public (art. 1162 C. civ.), ex. trafic de stupéfiants ;
- contrat violant une interdiction légale impérative, ex. pacte sur succession future (art. 722 C. civ.).
Prescription :
L’action en nullité absolue est soumise au délai de droit commun de 5 ans (art. 2224 C. civ.), courant à compter de la conclusion du contrat (art. 1185 C. civ.), même si une partie de la doctrine défendait autrefois son imprescriptibilité.
Caractère non confirmable :
Un contrat atteint de nullité absolue ne peut pas être confirmé par les parties.
Nullité relative
La nullité relative protège un intérêt privé, celui de la partie que la loi a voulu protéger contre une atteinte à son consentement ou à sa capacité.
Qui peut agir ?
Seule la partie protégée peut invoquer la nullité relative (art. 1181 C. civ.).
Exemples de causes de nullité relative :
- vice du consentement : erreur, dol, violence (art. 1130 et s. C. civ.) ;
- incapacité juridique d’une partie (mineur, majeur protégé) sans autorisation légale ;
- certaines règles protectrices en droit de la consommation (clauses abusives, information précontractuelle).
Prescription :
L’action en nullité relative se prescrit par 5 ans à compter de la découverte du vice (vice du consentement) ou du jour où la partie protégée a cessé d’être sous incapacité (art. 2224 C. civ.).
Caractère confirmable :
La nullité relative peut être couverte par la confirmation du contrat (art. 1182 C. civ.). La confirmation suppose que la partie protégée, en connaissance du vice, manifeste sa volonté de maintenir le contrat (ex. un mineur devenu majeur qui confirme un contrat conclu pendant sa minorité).
Les effets de l’annulation
L’annulation d’un contrat a pour conséquence principale d’anéantir rétroactivement l’acte, comme s’il n’avait jamais existé (art. 1178, al. 2 C. civ.). Cela entraîne à la fois une disparition rétroactive et une obligation de restitutions. Toutefois, la jurisprudence et le Code civil admettent certaines atténuations.
Rétroactivité
- La nullité produit un effet rétroactif : le contrat est censé n’avoir jamais existé.
- Les parties sont donc remises dans l’état où elles se trouvaient avant sa conclusion (restitutio in integrum).
- Cet effet est valable tant pour les nullités absolues que relatives.
Exemple : si un contrat de vente est annulé, la propriété transférée retourne au vendeur et le prix doit être restitué à l’acheteur.
Restitutions (art. 1178, al. 3 et 1352 à 1352-9 C. civ.)
L’annulation implique en principe la restitution réciproque de ce qui a été exécuté :
- 
Obligation générale : chaque partie doit rendre ce qu’elle a reçu. 
- 
Restitution en nature : si possible, la chose ou la somme doit être restituée telle quelle. 
- 
Restitution par équivalent : si la restitution en nature est impossible, elle se fait en valeur, par équivalent monétaire. 
- 
Prestations de service : elles sont en principe restituées en valeur, mais la jurisprudence apprécie selon les circonstances (ex. prestation déjà consommée, impossibilité de « rendre » une formation suivie). 
- 
Fruits et intérêts : la partie qui a profité de la chose doit aussi restituer les fruits produits (art. 1352-3 C. civ.) ou les intérêts du capital reçu. 
Exceptions et modulations à la rétroactivité
La rétroactivité peut connaître certaines atténuations :
- 
Contrats à exécution successive (art. 1184, al. 2 C. civ. par analogie) : lorsque le contrat a été exécuté sur une durée (ex. bail, contrat de travail), l’annulation ne permet pas toujours une restitution intégrale. Les prestations échangées demeurent valables pour la période écoulée. 
 Exemple : un salarié payé pour un travail effectivement accompli ne restitue pas son salaire.
- 
Nullité partielle : le juge peut limiter la nullité à certaines clauses du contrat, sans anéantir l’acte dans son ensemble, si l’économie générale du contrat peut être maintenue (art. 1184, al. 2 C. civ.). 
- 
Modulation dans le temps par le juge : dans un souci de sécurité juridique, le juge peut décider que la nullité ne produira pas tous ses effets rétroactifs, notamment lorsque les restitutions intégrales seraient impossibles ou manifestement injustes (ex. en matière de consommation ou de contrats de longue durée). 
Procédure d’annulation d’un contrat
L’action en nullité
L’annulation d’un contrat ne produit d’effet que si elle est invoquée par une partie et reconnue par le juge. L’action en nullité est portée devant la juridiction compétente : en principe le tribunal judiciaire pour les contrats civils et mixtes, ou le tribunal de commerce pour les actes conclus entre commerçants. Le juge vérifie si les conditions de validité du contrat, posées à l’article 1128 du Code civil – consentement, capacité et contenu licite et certain – sont réunies. Si l’une de ces conditions fait défaut, il prononce la nullité, qui entraîne l’anéantissement rétroactif du contrat. Dans certains cas, lorsqu’il s’agit seulement d’une nullité relative, les parties peuvent constater amiablement la nullité et organiser les restitutions, mais la nullité absolue requiert nécessairement une décision judiciaire.
Le délai pour agir
L’action en nullité est enfermée dans un délai de prescription. L’action en nullité relative, qui protège un intérêt privé, doit être exercée dans un délai de cinq ans. Ce délai commence à courir au jour où le titulaire de l’action a connu ou aurait dû connaître le vice : découverte d’un dol, révélation d’une erreur, cessation d’une situation de violence, ou encore majorité retrouvée par un ancien mineur.
L’action en nullité absolue, qui sanctionne une atteinte à l’ordre public, est également soumise au délai de prescription de droit commun de cinq ans, mais son point de départ est fixé à la conclusion du contrat. Si la doctrine avait longtemps considéré cette action imprescriptible, la réforme du droit des contrats de 2016 et la jurisprudence ont consacré la prescription quinquennale.
La charge de la preuve
La charge de la preuve incombe à la partie qui invoque la nullité. Elle doit établir l’existence du vice ou de l’irrégularité : par exemple, démontrer que son consentement a été obtenu par erreur, dol ou violence ; que l’autre partie était juridiquement incapable de contracter ; ou que l’objet du contrat était illicite. La preuve est en principe libre en matière civile (art. 1358 C. civ.) et le juge en apprécie souverainement la valeur. Si la nullité est reconnue, elle entraîne la disparition rétroactive du contrat et les restitutions prévues par la loi.
Annulation des décisions judiciaires et administratives
L’annulation ne se limite pas aux contrats et aux actes juridiques privés. Elle concerne également les décisions rendues par les juridictions et les actes émanant de l’administration. Dans ces deux domaines, l’annulation vise à garantir la conformité des décisions à la loi et à l’ordre juridique.
Annulation des décisions judiciaires
Lorsqu’un jugement ou un arrêt est entaché d’irrégularité ou d’erreur de droit, il peut être annulé par une juridiction supérieure saisie d’un recours. L’appel permet à une cour d’appel d’infirmer ou d’annuler une décision de première instance. Le recours en cassation, devant la Cour de cassation ou le Conseil d’État, conduit à l’annulation de la décision attaquée si elle viole la loi. Dans des cas exceptionnels, une décision définitive peut être remise en cause par un recours en révision, lorsqu’apparaissent des éléments nouveaux décisifs (faux, fraude, témoignage mensonger).
L’effet de l’annulation est rétroactif : la décision annulée est réputée n’avoir jamais existé. Toutefois, la juridiction qui prononce l’annulation peut renvoyer l’affaire devant une autre juridiction afin qu’elle soit rejugée, ce qui distingue ce mécanisme de l’anéantissement pur et simple d’un contrat nul.
Annulation des actes administratifs
En droit public, l’annulation est l’un des outils essentiels du contrôle de légalité exercé par le juge administratif. Saisi d’un recours pour excès de pouvoir, il peut annuler un acte administratif unilatéral (décret, arrêté, décision individuelle, circulaire) s’il est contraire à la loi, à la Constitution, aux principes généraux du droit ou aux traités internationaux.
L’annulation produit un effet radical : l’acte disparaît rétroactivement de l’ordonnancement juridique, comme s’il n’avait jamais existé. Cela peut bouleverser des situations acquises, par exemple l’annulation d’un permis de construire, qui prive rétroactivement le bénéficiaire du droit de bâtir. Pour éviter une insécurité juridique excessive, le Conseil d’État admet parfois une modulation dans le temps des effets de l’annulation : l’acte peut être annulé seulement pour l’avenir ou à compter d’une date fixée par le juge.
Conclusion
L’annulation constitue un mécanisme essentiel de sécurité juridique. Qu’il s’agisse d’un contrat civil, d’un acte juridique privé, d’une décision de justice ou d’un acte administratif, elle permet d’écarter rétroactivement les actes irréguliers et de rétablir l’ordre juridique. Elle assure que les conditions de validité des actes soient respectées et que l’ordre public comme les droits des particuliers soient protégés. Plus largement, l’annulation incarne une garantie fondamentale de l’État de droit, en veillant à ce qu’aucun acte entaché d’illégalité ne puisse produire durablement ses effets.
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