Dans le cadre d’un bail commercial, le locataire bénéficie d’un droit à la jouissance paisible des lieux loués. Lorsque ce droit est perturbé par des événements imputables au bailleur ou à des tiers, il est possible pour le locataire d’agir pour obtenir une indemnisation. Cet article a pour vocation de clarifier la notion de trouble de jouissance dans les baux commerciaux, les recours possibles et les modalités d’indemnisation disponibles pour le locataire professionnel.
Définition du trouble de jouissance en bail commercial
Le trouble de jouissance correspond à toute perturbation affectant l’usage normal des locaux loués. Cette notion s’apprécie au regard des modalités d’exécution du contrat de bail et de l’activité exercée par le locataire.
Nature du trouble
Le trouble peut revêtir diverses formes telles que :
- Des désordres matériels : infiltrations, défauts d’étanchéité, problèmes d’électricité ou de chauffage, etc.
 - Des troubles de voisinage (nuisances sonores, odeurs, etc.)
 - Des restrictions d’accès ou d’usage (fermeture administrative, travaux entravant l’exploitation, etc.)
 
Une attention particulière est requise dans le cas des travaux entrepris par le bailleur, lesquels peuvent temporairement limiter l’exploitation du fonds de commerce.
Origine du trouble
Le trouble de jouissance peut être imputable :
- Au bailleur lorsqu’il manque à son obligation d’entretien ou d’exécution correcte du contrat
 - À un tiers, notamment en cas de troubles de voisinage ou de travaux publics.
 
Obligations du bailleur en matière de jouissance paisible
Obligation de délivrance conforme
Le bailleur se doit de remettre des locaux en bon état et conformes à la destination prévue par le bail. Cette obligation est constante durant toute la durée du bail (article 1719 du Code civil).
Obligation d’entretien
Le bailleur est tenu de maintenir les lieux en état de servir à l’usage auquel ils sont destinés, sauf clause contraire expresse dans le bail commercial.
Quels recours pour le locataire en cas de trouble de jouissance ?
Dès constat d’un trouble de jouissance, le locataire doit réagir rapidement pour préserver ses droits.
Notification au bailleur
Le locataire doit notifier le trouble au bailleur par lettre recommandée avec accusé de réception. Il est important de décrire précisément la nature du trouble, sa durée, son impact sur l’activité commerciale, ainsi que les démarches déjà entreprises.
Demande d’indemnisation amiable
Avant toute action judiciaire, une tentative de résolution amiable est toujours souhaitable, surtout dans le cadre de relations commerciales durables. Le locataire peut solliciter :
- Une réduction du loyer pendant la durée du trouble
 - Une indemnisation de son préjudice commercial
 
Action judiciaire
En l’absence de solution amiable, le locataire peut engager une action devant le tribunal judiciaire compétent en matière de contentieux du bail commercial. Plusieurs types d’actions sont envisageables :
- Demande en exécution des obligations contractuelles du bailleur (réalisation de travaux, par exemple)
 - Demande d’indemnisation pour les préjudices subis (perte de chiffre d’affaires, perte de clientèle, etc.)
 - Résolution du bail en cas de trouble rendant l’exploitation impossible de manière durable
 
Évaluation du préjudice et indemnisation du locataire
Le montant de l’indemnisation dépendra de la gravité du trouble et de ses conséquences économiques pour le locataire.
Typologie des préjudices indemnisables
Les postes de préjudice classiquement retenus par les juridictions sont les suivants :
- Perte d’exploitation (baisse du chiffre d’affaires notamment imputable au trouble)
 - Atteinte à l’image commerciale de la société
 - Augmentation des charges liées à des solutions alternatives (location de locaux temporaires, frais de réparation à charge du locataire…)
 - Possiblement, préjudice moral dans les cas les plus graves
 
Apport de la jurisprudence récente
Les tribunaux reconnaissent de plus en plus fréquemment le droit à indemnisation dès lors que le lien entre le trouble et la perte financière est démontré par le locataire. Les juridictions exigent un lien direct et certain entre le trouble et la perte (art. 1231-2 C. civ.). Des éléments de preuves solides sont nécessaires (bilans, attestations, constats d’huissier, etc.).
Clauses du bail commercial limitant les recours
Certains baux commerciaux contiennent des clauses visant à limiter la responsabilité du bailleur. Toutefois, leur efficacité juridique dépend des circonstances :
- Les clauses d’exonération ne sont pas toujours opposables si le trouble est grave et rend le local impropre à l’usage prévu
 - Il est possible de contester une clause manifestement déséquilibrée sur le fondement de l’article 1171 du Code civil
 
Conseils pratiques pour les locataires professionnels
En cas de trouble de jouissance dans un bail commercial, les chefs d’entreprise doivent :
- Signaler formellement le trouble au bailleur
 - Documenter méthodiquement les impacts sur leur activité
 - Faire appel à un professionnel du droit pour évaluer les options amiables et contentieuses
 
Ne laissez pas une situation dégradée impacter durablement la santé de votre entreprise. La réaction rapide et documentée est essentielle pour préserver vos droits.
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